Un peu d’histoire
Avant le débarquement américain de juin 1944, le général de Gaulle avait prévu la restauration de l’Etat, en particulier en regroupant
toutes les composantes des maquis sous le vocable FFI, la création d’un gouvernement provisoire de la République et différents organismes
tel que les CDL et les CLL permettant de canaliser les forces politiques locales. Le CDL est sensé conseiller le Préfet et le CLL le maire. En réalité leurs actions sont limitées et le pouvoir central va les marginaliser assez rapidement.
Dès septembre 1944, les communes retrouvent provisoirement le maire d’avant la guerre ou un nouveau qui est désigné par le Préfet.
Les Français, hommes et femmes (une nouveauté), sont appelés aux urnes de nombreuses fois :
- 1944 septembre : les anciens maires sont installés ou nommés par le préfet
- 1945, 13 mai : élections municipales.
- 1945, 21 octobre : référendum pour abolir la constitution de la IIIe République
et élections d’une assemblée constituante
- 1946, 20 janvier, démission du général de Gaulle
- 1946, 5 mai : second référendum sur un projet de constitution qui est rejeté
- 1946,13 octobre : troisième référendum sur un nouveau projet de constitution qui est accepté
- 1947, le 16 janvier : Vincent Auriol est élu Président de la République, la IVe République est née. Elle durera 12 ans avec… 22 gouvernements.
- 1947, 26 octobre : élections municipales
- 1953, mai : élections municipales
La situation à Cairanne
1939, élection du maire Edmond Rabasse, 65 ans, radical-socialiste.
E. Rabasse démissionne pour raison de santé le 20 février 1941 . Le premier adjoint Eugéne Armand, communiste, devient maire.
Sans autorité, il est sous l’influence du secrétaire-instituteur Didier Faure, grand ami de Daladier, ancien député radical socialiste.
1942 mai, Eugène Armand est démis de sa fonction par le Préfet, remplacé par une délégation spéciale présidée par André Mévil, pétainiste,
propriétaire du château Gallifet. Démission du secrétaire de mairie Didier Faure.
1944, le 26 août, Cairanne est libéré par les américains.
1944, le 4 septembre, passation des pouvoirs entre un membre de la délégation spéciale et le nouveau maire Albert Brichet socialiste et
FFI et
les conseillers municipaux de Cairanne nommés par le Préfet. Albert Brichet, 46 ans, est un modéré. André Mévil est arrêté par les FTP de Suze-la- Rousse
et de Cairanne et emprisonné à Buis-les-Baronnies. Il sera libéré trois mois après.
1944, le 7 septembre est créé le Comité local de Libération (CLL) de Cairanne avec 6 communistes, 5 socialistes et un indépendant qui est censé
s’impliquer dans le choix du maire ! Le Préfet l’a précédé pour élire un maire.
Son haut fait est de faire incarcérer trois cairannais LF, AM et DM au centre de séjour surveillé de Sorgues pour… profits
abusifs !
Cette accusation sera transformée en collaborateur à leur entrée à Sorgues. Ils seront libérés le mois suivant
(Avril 1945).
1945, à Cairanne, il y a maintenant 254 électeurs hommes et 265 électeurs femmes .
Le vote des femmes perturbe la gente masculine. Le sous-préfet écrit au préfet en ces termes :
Le vote des femmes dans la circonscription de Carpentras est un problème dont la solution s’avére assez délicate. Il est à remarquer cependant que
dans l’ensemble du secteur, beaucoup de femmes appartenant à la classe bourgeoise ont négligé de se faire inscrire sur les listes électorales. Malgré tout,
on pense que les électrices dont la grande majorité ignore tout de la politique subiront l’influence de leur mari ou de leurs proches parents et qu’elles
orienteront leur suffrage dans ce sens.
1945, les 29 avril et 13 mai, élections municipales. À Cairanne : 4 postes sont élus au premier tour, 8 postes à pourvoir au deuxième tour, 8 élus rassemblés
sous la liste Unité républicaine et antifasciste (sous influence communiste), le maire Jules Fabre 75 ans est élu, Didier Faure revient comme secrétaire.
Jules Fabre est marchand d’engrais au détail .
À cette époque, il y a quelques règles d’inégibilité dont celle de famille. Comme tout le monde est cousin à Cairanne, deux élus se retrouvent l’un beau-père et
l’autre beau-frère d’élus du premier tour et ce qui ne plait pas à certains non-élus. La préfecture saisie leur donne raison !
Albert Brichet ancien FFI, maire provisoire et le Dr Achiary, organisateur d’un hôpital clandestin de la Résistance ne sont pas élus ce qui fait dire au
sous-préfet que des hommes unis dans la clandestinité pour combattre l’ennemi subordonnent maintenant l’intérêt d’une idéologie à l’intérêt général .
1945, 21 octobre, référendum : question 1, pour abolir la IIIe République : oui 339 non 37, question 2, pour établir une assemblée constituante : oui 197 (53%), non 179.
L’assemblée élue doit établir et adopter une nouvelle Constitution, puis la soumettre à l'approbation des Français, par voie de référendum.
Les Français répondent « oui » à 66 %, les communistes et radicaux ont appelé à voter contre d’où le résultat de Cairanne.
1946, le 26 septembre le maire Jules Fabre démissionne pour raison de santé, remplacé le 6 octobre par le premier adjoint, Albert Roman communiste.
Le garde champêtre Charles Roger Charles qui avait été malmené à la Libération
est remplacé par Bremond Benjamin Bernard.
1947, le 26 octobre, élections municipales c’est la liste Gabriel Gigue, 80 ans, qui est élu maire. (Liste Radical Socialiste et SFIO,
centre gauche contre liste Unité républicaine et résistante, communiste).
1953, le 3 mai, élections municipales c’est Raoul Grosset 52 ans qui est élu jusqu’en 1971.
(Liste d’Union républicaine menée par Raoul Grosset, 12 élus, contre liste d’Union indépendante mené par Gérard Pierrefeu, 0 élu).
En ces temps-là, les Cairannais penchent à gauche gauche au moins jusqu’en 1981 aux élections du président de la République puisque le candidat Georges Marchais,
candidat communiste, arrive en tête au premier tour en obtenant 25% des voix alors que la moyenne nationale est 12%
.
Un oubli regrettable
Jule Fabre est bien élu maire le 20 mai 1945 à la majorité absolue par 11 voix sur 12 des conseillers municipaux. Il démissionne le 26 septembre 1946 pour raison de santé.
Tout cela est consigné dans les comptes rendus des conseils municipaux.
Pourtant dans le tableau de la mairie « Cairanne honore ses Maires » accroché dans le hall de la mairie, qui liste le nom des maires depuis 1790,
le nom de Fabre n’apparait pas entre Brichet et Roman.
Omission volontaire ? Si oui, quelle en est la raison ?
Nous n’avons pas la réponse !
Gérard Coussot
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 CDL : Comité Départemental de Libération ;
CLL : Comité Local de Libération
Source : privée
Centre de séjour
surveillé de Sorgues
Ce centre est créé en décembre 1944 dans le but de maintenir les suspects avant comparution devant les tribunaux.
On y entasse jusqu’à 300 personnes aussi bien le vrai collaborateur que l’innocent dénoncé par son voisin.
Or seules les personnes estimées dangereuse pour la défense nationale ou la sécurité publique doivent être retenues.
Nos cairannais sont vite libérés !
Ce centre sera dissous en décembre 1945.
 ADV 3W142
 ADV 3W146
 ADV, 3W146
 ADV, 22W18
 ADV,12W12
 ADV, 3W126
 ADV, 36W7
Source : Archives de Cairanne
Election du maire Jules Fabre le 20 mai 1945 par 11 voix sur 12
Source : mairie de Cairanne
Tableau en mairie de Cairanne, Jules Fabre est oublié !
 ADV, 2P292
 Voir chronique de juin 2024 : les FFI arrivent à Cairanne.
 ADV, 166W76
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