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La chronique de février 2023

Officiers de santé à Cairanne au XIXe siècle (2)
Chirurgiens aux siècles précédents


Source : : Gallica
La fièvre typhoïde selon le Dr Rengade, 1879

point1  Abbé André, Neuvaine à tous les saints patrons du diocèse d’Avignon à l’occasion du choléra, BMA 8°24433.

point2  ADV, J. Léonard, Médecins, malades et société au XIXe siècle, 1992.

point3 La fièvre typhoïde, F.Waton, docteur à Vaison, 1843.

La fièvre typhoïde
Aujourd’hui, on sait que la fièvre typhoïde est due à une bactérie Salmonell typhi qui n’infecte que les humains en provoquant une maladie grave. La contamination se fait en général avec de l’eau contaminée. Symptômes : apparition progressive d’un malaise général accompagné de céphalées, d’une fatigue importante, d’insomnie et de troubles digestifs. La température atteint 40°, langue saburrale, présence de râles bronchiques, augmentation de la rate. Divers complications peuvent venir aggraver le tableau initial. Traitement : plusieurs antibiotiques restent actifs sur cette bactérie.

Source : musée de la Médecine, Paris
Outils de base du chirurgien : Le clystère

point  Extrême faiblesse musculaire.

point  Revue médicale française et étrangère, 1844

Source : musée de la Médecine, Paris
Outils de base du chirurgien : Outils à saigner

point1  Notaires Gasparin, 2E70137 et 2E70152.

point1  Notaire Bon, 3E70252, f°727.

point1  Notaire Gasparin, 3E70 243, f° 248, inventaire de Pierre Nicodel.

point1  AC Cairanne F1.


Baptiser sous condition
Pour la religion catholique, le baptême efface le pêché originel. Un enfant mort sans baptême est condamné à errer éternellement dans les limbes. Le baptême assure à l’enfant son éternité. Un enfant mort-né ou en danger de mort à la naissance doit être baptisé. C’est l’une des raisons pour lesquelles la sage-femme, ici le chirurgien, avait le pouvoir de baptiser, donné par le curé. L’enfant est baptisé sous condition : il suffit que des témoins attestent qu’ils ont aperçu un mouvement du cœur, un semblant de respiration, le tressaillement d’un doigt, un souffle … cela suffit ; un miracle qui n’étonne guère, tant est grand le désir de baptiser. L’enfant mort, retrouve la vie quelques instants, le temps de recevoir le baptême.
Source : Geneanet


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Dans la chronique précédente, nous avons présenté les officiers de santé Roux. Voici quelques-unes de leurs interventions.

Épidémie de choléra de 1832

L’épidémie vient du nord de la France.
Le 26 avril 1832 le sous-préfet d’Orange demande aux maires de son arrondissement les moyens sanitaires dont ils disposent pour lutter contre l’épidémie. Le maire de Cairanne répond :
  • Qu’il y a dans cette commune deux officiers de santé
  • Qu’il n’y a point de pharmacien
  • Que les Mrs Roux père et fils, officiers de santé, dévoués l’un l’autre au soulagement de l’humanité souffrante porteront alternativement les secours de l’art sur telle part de l’arrondissement qu’il plaira à M. le Préfet de leur désigner
  • Je me suis assuré de quatre personnes de sexe féminin pour le service d’infirmerie
Le maire n’est autre que Roux père.
Par comparaison, Sainte-Cécile a deux médecins et un chirurgien, Rasteau a un officier de santé, Roaix rien et Camaret un officier de santé et deux élèves médecins. Le nombre de morts à Cairanne n’est pas connu. À l’occasion de cette épidémie, l’église catholique publie une notice point1 : Chrétiens, nous vous offrons aujourd’hui un moyen sûr de faire cesser le choléra : la prière !
Cependant une évolution des mentalités se fait, le malade n’est plus la victime des péchés humains et des châtiments divins mais la victime du milieu et de l’hérédité point2.

Une intervention de l’officier de santé Roux

En 1843, le Dr Waton de Vaison publie un livre La fièvre typhoïde et rapporte le fait suivant point3:
Observation 30
Reynaud de la Bousquette à Cairanne, âgé de 52 ans, tempérament sec, est pris d’un froid vif étant en sueur, éprouve un frisson le soir, sue la nuit et le lendemain 8 octobre 1837, il se sent mieux et prend un peu d’aliments, le soir , il est encore fatigué, il dort peu et le lendemain il n’a pas le courage de se lever ; M. Roux officier de santé à Cairanne est appelé, il prescrit une tisane adoucissante et la diète ; l’état du malade empirant, je me rends auprès de lui le 16 au matin.
La figure est plutôt pale, les conjonctives sont légèrement injectées, céphalalgie sus-orbitales, lèvres sèches, langue, gencives et voute palatine tapissées d’une matière brune, gluante… on arrache cette matière avec les doigts et il en reparait presqu’autant une heure après…

Continuation des moyens prescrits par M. Roux + 20 grains de sulfate de quinine dans la bouche. 21 au matin, stupeur plus grande qui va en augmentant jusqu’au 28, époque à laquelle le malade succombe. Conclusion du Docteur de Vaison : La quinine n’a eu aucune influence sur les redoublements, la maladie a toujours été en s’aggravant et Reynaud a succombé dans le dernier état d’adynamie point4.
Il s’agirait de la fièvre typhoïde causée par une bactérie découverte en 1885. La mise au point d’un vaccin prend dix ans et est d’une grand efficacité. Le principal traitement est à base d’antibiotiques qui ne sont produits qu’après 1945, plus d’un siècle après l’intervention des Drs Roux et Waton, impuissants !
Le livre du Dr Waton est fortement critiqué dans le recueil de la Société de médecine de Paris point5 avec un argumentaire tout aussi abscons et une remarque pertinente : l’ignorance de la médecine face à la fièvre typhoïde, ce mot est à la mode aujourd’hui !

Chirurgiens aux siècles précédents à Cairanne

La définition du chirurgien des temps passés surtout dans les campagnes est bien différente de celle d’aujourd’hui. Il est associé à un barbier jusqu’au milieu du XVIIIe siècle où en 1748 Louis XV donnera à cette profession ses lettres de noblesse en créant l’Académie Royale de Chirurgie. Supprimée à la Révolution, elle devient en 1820 l’Académie Royale de médecine regroupant médecins et chirurgiens. Dès 1802, une formation commune pendant trois ans pour les médecins et les chirurgiens se met en place.
Aux siècles précédents, le chirurgien se loue à l’année auprès d’une communauté. Pour Cairanne, nous avons trouvé quatre bails de la fin du XVIIe siècle point6. Le chirurgien est embauché par la communauté de Cairanne pour un an. Il est payé pour faire des saignées gratuites à la demande des habitants (une approche de Sécurité sociale !). Par contre il est rétribué par les habitants pour les interventions et les médicaments. De toute façon ses pouvoirs sont limités : il panse, réduit les fractures, extrait les dents et bien entendu saigne. Les médicaments sont à base de plantes. Il a le droit de purger, saigner et clystériser les pauvres malades !
Au XVIIIe siècle, à Cairanne nous n’avons pas trouvé de bail mais des actes notariés impliquant des chirurgiens : Gondran, Tac, Bon, Courbateur, Gagniére, Eyrié. Un chirurgien a retenu notre attention dans des circonstances tragiques. En 1790, le sieur Nicodel de Cairanne traverse l’Aygues avec son épouse enceinte de sept mois. Le charriot se renverse et son épouse se noie. Ayant été tirée de l’eau et reconnue pour morte, il a été fait l’ouverture pour sauver s’il était possible l’enfant dont elle était enceinte lequel enfant ayant été retiré du sein de sa mère, il a été baptisé sous condition par le chirurgien Gagniére qui a dit et déclaré ainsi que deux témoins, que l’enfant avait respiré et ouvert la bouche comme compté dans le procès-verbal… point7
Ce même chirurgien officie longtemps à Cairanne puisque qu’il y est déjà en 1766 point8. En 1786, le recteur de l’hospice demande à l’évêque de Vaison son exclusion de l’hospice pour de « bonnes raisons » ce qui sera accordé mais il reste à Cairanne point9.

Gérard Coussot

Summary: this chronicle describes the activities of ‘Officiers de santé’ (second-class doctors) in Cairanne at the beginning of the 19th century for an epidemic of cholera and typhus. It is pointed out their therapeutic impotence. In previous centuries, only unqualified surgeons practiced in Cairanne for very simple, inefficient medical activities based on bloodletting.

Note après publication de la chronique de janvier 2023 sur les officiers de santé Roux


Un adhérent médecin nous a fait remarquer que cette chronique est fort d’actualité. En effet devant la pénurie de médecins, les pouvoirs publics viennent de recréer un corps d’Officiers de Santé sous le vocable d’Infirmiers en Pratiques Avancées (IPA). Un IPA sera un infirmier expérimenté d’au moins 3 ans d’exercice et 2 ans de formation. Celui-ci pourra exercer les mêmes fonctions qu’un médecin d’aujourd’hui, sous-entendu dans les milieux ruraux et défavorisés. « Il reviendra vers le médecin lorsque les limites de son champs de compétences seront atteintes ou lorsque il repérera une dégradation de l’état de santé d’un patient ». Note du Ministère de la Santé et de la Prévention, Internet 2023.
Retour au XIXe siècle !

Mise à jour : le 1 février 2023
webmaster : Gérard Jacques Coussot