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La chronique d'avril 2023

Naître et vivre en Vaucluse au XIXesiècle


point1  Dr Lucas-Championniére, Statistique du personnel médical,1845, Bibliothèque du muséum d’Histoire Naturelle.


Source : Archives nationales
 Publicité vers 1920 : le problème des décès des enfants est toujours présent

point1 Isabelle Borie, Mémoire Universitaire, L’enfance assistée en Vaucluse, sous Internet.

point1 Dr Pamard, De la mortalité dans l’arrondissement d’Avignon des enfants de 0 à 5 ans dans ses rapports avec les phénomènes météorologiques, rapport manuscrit, MS 188(84), Académie nationale de médecine.

point1 F.Bec De la mortalité des enfants du premier âge dans le département de Vaucluse, Thèse sous Gallica.

point5  A.Devot, Essais de statistiques médicales, Thèse, 1855,11.883, Bibliothèque du muséum d’histoire naturelle.

Source : mairie de Cairanne
Heureux conscrits de Cairanne vers 1930
À droite M.Guigue instituteur et maire de Cairanne (1930-1938)


La maladie scrofuleuse :
un grand fantasme du XIXe siècle

Les médecins avaient cru la reconnaître dans certains signes, qui, réunis dans un même individu, donnaient à son corps et surtout à son visage un aspect particulier. Ces signes caractérisaient une maladie la scrofule. La tête est trop petite ou trop grosse, surtout à la partie postérieure; le front est souvent bas, les tempes sont aplaties ; la face est pâle ou très colorée, les traits sont gros, les lèvres sont épaisses, surtout la lèvre supérieure; les mâchoires sont larges, fortes ; le nez est épaté, il est gros à sa pointe et aplati à sa racine ; les narines sont étroites, ce qui oblige à respirer par la bouche ; les yeux sont habituellement d’un bleu tendre, ternes, sans expression.
(Aujourd’hui, certaines formes de scrofules pourraient être classées parmi les affections tuberculeuses ou syphilitiques)
Source : Dr Bazin, La scrofule, 1861, Gallica

point6  ADV, 5M34, Santé publique et hygiéne

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La rédaction de la chronique : les Roux, officiers de santé à Cairanne au XIXe siècle du mois de février 2023 nous a conduits à consulter de nombreux documents souvent sombres sur la médecine en Vaucluse au XIX e siècle dont nous proposons de faire la synthèse.

La situation médicale en Vaucluse point1

Le nombre d’habitants au milieu du XIXe siècle est voisin de 240 000. Le nombre de médecins est de 123 et le nombre d’officiers de santé 92 soit 215 praticiens ce qui correspond à un chiffre de 1 médecin pour 1116 habitants relativement bon pour l’époque entre le département de la Seine surmédicalisé (déjà), 1 médecin pour 662 habitants et le département du Morbihan 1 médecin pour 5 274 habitants.
Il faut noter aujourd’hui pour le Vaucluse, le chiffre de 1 médecin généraliste pour 1071 habitants, inférieur à celui du XIXe siècle !

Naître et vivre en Vaucluse

Dans le prolongement du XVIIIe siècle une partie des nouveau-nés est promise à la mort. Dans les campagnes, on a recours aux offrandes et aux prières à des saints spécialisés ; on fait aussi appel à des rebouteux et à divers guérisseurs. Le médecin est appelé très tard, in extremis, souvent pour constater le décès de l’enfant point1.
Ces pratiques, encore observées au XIX e siècle, expliquent les chiffres suivants.
Selon les calculs du docteur Pamard d’Avignon point3 le taux de mortalité infantile entre 0 et 5 ans en Vaucluse dans le canton d’Avignon dans les années 1873-1877 est de 32 %. Mais les variations locales sont importantes. À Avignon il n’est que de 20 % tandis que maximum est atteint à Saint Saturnin avec 54%.
À Cairanne il est de plus de 30% point4.
Le docteur Pamard ajoute : ce tableau démontre que dans toutes les communes, le tribut payé à la mort par la jeune génération de 0 à 5 ans est exagérément élevé et de plus que la cause de cette mortalité doit être trouvée dans les chaleurs qui se montrent pendant les trois mois de l’été. Notons aussi que les communes où sévit avec le plus d’intensité cette mortalité estivale sont les communes rurales c’est-à-dire où règnent avec tous les préjugés sur les maladies de l’enfant ces théories dangereuses qui poussent à alimenter l’enfant beaucoup trop tôt… La mortalité des enfants est liée aux maladies infectieuses, telles que la rougeole, la scarlatine, les entérites et les diarrhées plus les poussées épidémiques du choléra (1866) et de la variole (1871), la détérioration des conditions de vie inhérente des années 1873-1892.

Etat sanitaire des survivants à 20 ans

Après les hécatombes napoléoniennes, le Français délaisse le métier militaire et l’idée d’une armée de métier composée de volontaires, se révèle impossible. De ce fait, la conscription ou service militaire obligatoire est nécessaire. La conscription impose donc de recruter les jeunes gens de 20 ans en état physique de faire un service militaire. Nous allons tirer des informations d’une thèse de médecine publiée en 1855 et qui recense les raisons d’exemption pour les jeunes de faire leur service militaire pour chaque département dont le Vaucluse sur une période de 1837 à 1849 point5 . Le Vaucluse à part Avignon, Carpentras et Orange a une population paysanne agricole assez homogène. Les statistiques sont donc valables pour les jeunes de Cairanne.
Pour le Vaucluse, le nombre de jeunes examinés est de 14 349 sur cette période.
Raison exemption % de refusés Notes
Faiblesse de constitution 6%  
Taille 5% la taille minimum est 1,56 m
Difformité 4,5 %  
Hernies 2%  
maladie des yeux 1,2%  
Vice scrofuleux 0,7% voir encart , La maladie scrofuleuse : un grand fantasme du XIXe siècle
Myopie 0,6%  
Maladie poitrine,
Maladie peau,
perte doigts ou dents,
teigne,
epilepsie,
goître,...
12,8% la perte des canines est éliminatoire car le soldat doit déchiqueter la cartouche avec les dents
le goître est liée à une carence en iode attribuée à l'eau de boisson pas assez minéralisée
Total 34 %  

Pour le Vaucluse, 34% des jeunes sont dispensés de service militaire chiffre important mais qui est cependant en dessous de la moyenne nationale qui est de 38% !
Ce sont des défauts corporels qui dominent, ce que l’auteur attribue à une alimentation non équilibrée.
Le plus mauvais score est pour les maladies des yeux et la myopie, le Vaucluse est classé au 77eme rang sur 86 départements.
Pour Cairanne, au XIXe siècle le nombre de conscrits oscille, selon les années, entre 14 et 4. La moitié n’est pas « bon pour le service » soit pour des raisons médicales, soit pour exemption (soutien de famille, frère déjà militaire,…)
À cette époque, l’espérance de vie est de 40 ans. Aujourd’hui elle est de 79 ans pour un homme.
Cette génération devra affronter les poussées épidémiques du choléra (1866) ,de la variole (1871), la détérioration des conditions de vie liée à la dépression économique des années 1870-1890 (maladie des vers à soie, phylloxera et abandon de la garance).
En 1864, une enquête est menée sur le crétinisme et le goître dans le Vaucluse : la réponse est « néant » pour Cairanne point6 . Ouf !
Par contre les villages au pied du Ventoux : Brantes, Saint-Léger, Savoillan présenteraient un caractère endémique de cette maladie, position influencée sans doute par la présence de cette maladie dans les régions montagneuses : « Les crétins des Alpes ». Ce n’est qu’en 1922 qu’un bon dosage de l’iode est établi pour contrecarrer un dysfonctionnement de la thyroïde.

Gérard Coussot

Summary: This chronicle is about survival statistics in Vaucluse during the 19th century. Two issues are described: (i) the number of deceased children between age 0 to 5 (20% to 50%), (ii) the number of young guys eliminated at the medical examination before their military service (35%). Figures are issued for Cairanne.


Mise à jour : le 1 avril 2023
webmaster : Gérard Jacques Coussot