La chronique de février 2021
Mardi-Gras à Cairanne en 1950 |
Le matin du Mardi-gras, mes frères et moi, vêtus de vieilles nippes, le visage passé au bouchon de liège noirci, partons dans la campagne pour
quêter dans les fermes des oeufs, des bonbons ou des oranges. Nous nous présentons en disant : « I’a rèn pèr li mouresco ? » , formule traditionnelle dont nous ne savons même pas la signification mais qui nous ouvre les portes comme pour d’autres équipes de gamins quêtant la même provende. Pendant ce temps la jeunesse cairannaise s’active pour préparer le Carmentran mannequin de paille qui est amené en fin d’après-midi sur la placette devant le café Manifacier pour y être jugé. Accusé de tous les maux de l’année écoulée, la sentence de la crémation est mise à exécution sous les huées de l’assistance, le Carmentran flambe au rythme des couplets de la chanson de circonstance « Adiéu paure Carmentran » :
J’ai huit ans et je suis très impressionnée par ce rituel un peu barbare venu de la nuit des temps... Après la pause du repas du soir, la fête reprend avec le bal dans la salle du Casino jouxtant le Café Manifacier. Les musiciens Cairannais : Marcel Rabasse à la grosse caisse, Pierre Armand à la clarinette, Michel Lacrotte au violon, Gaby Jubain à l’accordéon et Lucien Danjaume à la trompette s’accordent pour commencer à jouer les premiers tangos quand tout d’un coup l’un des gamins qui guette l’arrivée des « mouresco » (les jeunes qui étaient chez l’un d’eux à apprêter le déguisement de la soirée), jette le cri : « Les mouresco, les masques ! » Arrive en farandole, toute une bande travestie et masquée qui envahit le Casino sous le regard des anciens assis autour de la salle qui cherchent à savoir qui se cache sous les déguisements de sorcières, cow-boys, danseuses espagnoles, clochards et autres . Tangos, polkas, paso-doble, javas, s’enchaînent jusqu’à minuit où les travestis se démasquent au milieu des gamins excités qui courent comme des fous entre les danseurs. Le bal reprend de plus belle jusqu’à une heure avancée de la nuit. La fête du Mardi-Gras perdure quelques années, soutenue par une jeunesse active qui s’adapte à la tradition, confectionne parfois un char, et déguste rituellement le soir l’omelette, au Café Manifacier avec les œufs collectés dans la journée avant le bal de clôture d’une journée bien remplie. Anne Laberinto-Gridine
Rappel sur le Carême
Pour les chrétiens, c’est une période consacrée à la préparation de la fête de Pâques par le jeûne (pas de viande), la contrition des sens (abstinence sexuelle)
et une instruction religieuse renouvelée.Le Carême commence par le mercredi des cendres, c’est-à-dire le lendemain du Mardi-Gras, jour de liesse : les confettis se travestissent en cendres . L’ambiguïté règne : les cendres de Carmentran du mardi se confondent avec les cendres imposées aux fidèles le mercredi. Toute liesse est dérisoire et la condition humaine n’est que poussières et cendres. Le Carême se termine le jour de Pâques. Le Mardi-Gras doit prendre fin le soir au premier coup de minuit ! Il devait y avoir quelques excès. Puisque le clergé d’Avignon, en 1658, est obligé de prendre des mesures pour contribuer à esteindre les débauches du Carnaval, mesures qui curieusement restent dans l’esprit d’un carnaval (Voir la légende de l'image jointe) GC
Summary : This text recalls the celebrations that used to take place in Cairanne for Mardi-Gras. The whole village was taking part,
young and old alike, and everyone went to the ball and stayed late at night.
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Mise à jour : le 25 juin 2024 webmaster : Gérard Jacques Coussot |