La chronique du mois de juillet-août 2015 L’école à Cairanne en 1877 1 |
Nous complétons la chronique du mois de juin 2015, relative à l’arrivée de l’eau aux écoles en
1906, par cet extrait sur l’école de Cairanne par Denis Alary 2 . Je dois retourner de trois ans à quatre ans en arrière, pour parler de mon entrée à l’école. J’avais 7 ans quand on me conduisit à celle de M. Affre, à la mairie de Cairanne, aucun groupe scolaire n’existait à cette époque. Il y avait dans ce moment-là, environ 40 élèves, comportant 4 divisions. C’étaient les grands de la 1er division qui apprenaient à lire aux tous petits de la 4 er, le maitre avait assez à faire avec les trois autres. Il n’y avait pas, en 1873, d’école enfantine, lors de mes débuts, et il était absolument seul pour s’occuper de tout ce petit monde... Le certificat d'études En 1877, on institua le Certificat d’étude pour le canton de Vaison, qui ne l’avait pas eu jusqu’alors. Nous étions 4 élèves parmi les grands à peu près d’égale force. N’ayant pas osé nous y amener, notre maitre M. Affre était allé seul à l’examen de Vaison. Dès son retour , il n’eut rien de plus pressé que de nous faire exécuter tous les devoirs imposés et , après les avoir corrigés, il nous dit qu’il regrettait beaucoup de ne pas nous avoir présentés car nous aurions été surement reçus... L’année suivante en 1878, deux de nous quatre, Alphonse Fabre et Auguste Bommel entrèrent au couvent, le troisième Adrien Gondrand quitta l’école aussi, son père ne voulant rien savoir. Moi-même, pendant la saison des vers à soie, je restai 15 jours, à aider mes parents mais je retournai à l’école sitôt après. Vous pensez si M. Affre était désolé, il avait pris beaucoup de peine pour nous et il était mal récompensé. Il alla trouver le père Gondrand et réussi à le convaincre de lui envoyer son fils à l’école pendant tout le mois de juin, l’examen étant fixé vers le 10 juillet... Le jour de l'examen Mon père nous conduisit ce jour-là à Vaison les deux élèves et le maitre, et le matin fut consacré à l’écrit. Nous étions 9 candidats du canton, 7 restèrent sur le carreau à ce premier examen et nous restâmes seuls pour aborder l’oral l’après-midi. M. l’inspecteur me fit faire la lecture, m’interrompant de temps à autre pour me demander l’explication de certains mots. Je me rappelle très bien qu’il m’arrêta sur le mot « thermomètre » et le lui répondis textuellement qu’il avait été formé par deux racines grecques dont la première « thermos » signifie chaleur et la deuxième signifie « mesure », c’est donc un instrument servant à indiquer la « chaleur ».L’inspecteur ne s’attendait pas à une telle réponse. Se retournant vers M. Affre qui était présent, M. l’inspecteur lui dit : Vous avez donc donné les « Racines Grecques » à ces enfants ? Toutes mes félicitations. A partir de ce moment, l’examen, sur toutes les autres questions marcha tout seul. Mon camarade Gondrand répondit comme moi et nous fumes reçus seuls du Canton. moi avec 84 points sur 90 maximum des très bien et Adrien Gondrand : 82 1/2. Aussi le soir au retour l’instituteur jubilait-il et il fit l’impossible pour décider mon père à me pousser plus avant dans mes études, mais mon père avait d’autres vues sur moi et quoi qu’on put lui dire il ne voulut jamais consentir à se séparer de moi……Mon père voulait que moi, le jeune, je puisse lui fermer les yeux et sois le continuateur de la lignée. Je restai donc à l’école de Cairanne jusqu’à 14 ans, faisant division seul, car tous mes camarades de mon âge travaillaient chez leurs parents ou bien étaient loués comme bergers ou encore à l’atelier de la soie Denis Alary Margot Jubain aime à se rappeler le temps où son voisin Brun, qui habitait dans la montagne,
allait dans la classe de Monsieur Affre
dont la réputation de sévérité était bien établie mais aussi l’efficacité de son enseignement
« Il était bien sévère et on ne rigolait pas avec lui mais mon voisin Brun était devenu
bien savant ».
Summary : Following the previous chronicle about school in Cairanne, here is an extract
from Denis Alary's memories concerning a specific French exam : "le certificat d'étude" for young people which
was very valuable in those days (1877).The teacher of Cairanne, Charles Affre, trains two pupils in order
to pass this exam. Denis Alary reports the exam day and how he and his friend, Adrien Gondrand pass it.
He is very grateful to his teacher
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1 Nous remercions M Chazottes de la Bibliothèque municipale d’Avignon de nous avoir autorisés à publier cet extrait. 2Denis Alary, Extraits, Depuis plus de cent ans en Provence : un village, une famille. Rapport dactylographié, Centre d’étude des techniques agricoles, 1972 Bibliothèque municipale d’Avignon, 4° 19989. NB: les intertitres ont été rajoutés pour une meilleure lisibilite à l'écran. |
L'école en 1877 Collection Nicole Delubac Charles Affre instituteur à Cairanne de 1872 à 1905 Collection Suzanne Robic Charles Affre comme tous les maitres d’école ou instituteurs de la fin du XIXe
siècle est un personnage essentiel voir mythique du village. Comme beaucoup d’autres,
Charles Affre est aussi secrétaire de mairie. Il fréquente les élus, ce qui lui donne
la possibilité de faire bouger les choses pour l’école.
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Mise à jour : le 11 mai 2024 webmaster : Gérard Jacques Coussot |